Une nouvelle collection originale chez Yellow Now dirigée par Dominique Païni : un focus sur un objet ou un concept qui traverse l’œuvre de cinéastes en leur donnant du sens.
Philippe Roger, maître de conférences à Lyon, est connu pour son amour de la musique et se distingue par l’exégèse éclairée qu’il fait de l’œuvre de Jean Grémillon (voir chez le même éditeur l’ouvrage sur Lumière d’été et les commentaires en bonus du Dvd) .
Son opus sur l’Attrait du Piano est logiquement pertinent en nous permettant d’évoquer nombre de cinéastes chez qui l’instrument de musique ajoute une réelle plus-value à l’œuvre : passeur d’âme chez Oliveira, il « façonne l’immatériel » chez les cinéastes-musiciens Ophuls et Grémillon (dont on attend encore la réédition du Ciel est à vous) ; l’instrument s’inscrit dans une dialectique du temporel (piano-horloge) et du spirituel (piano-miroir de l’éternité) qui transparaît dans le reste de l’ouvrage fort bien documenté en images tirées des films évoqués.
Au gré des chapitres, le piano joue des rôles complexes et remplit de multiples fonctions (boîte à musique chez Renoir, cœur chez Lubitsch, rêve chez Dreyer, outil chez Hitchcock, ange chez Demy mais démon chez Edmond T. Gréville…)
Le chapitre sur le piano porte-voix est particulièrement éclairant sur le sens donné par l’instrument dans des films d’auteurs variés tels Ray, Godard, Guiguet, Bresson et Pasolini.
En fin de compte, ce petit livre par le format est une mine qui donne envie de redécouvrir des classiques du septième art en étant convaincu que leur partition musicale est, comme le disait si bien Kubrick, l’essence de l’art cinématographique, qui peut parfois approcher l’œuvre d’art totale rêvée par Wagner…