Voilà une œuvre assez unique dans l’univers de la BD : cent quatre-vingt pages sans aucun personnage ni aucune bulle mais un sous texte pas toujours explicite dont le sens ramené aux images de paysages souvent désolés et décadrés est à découvrir…Le texte n’aide pas à mieux comprendre les images mais complexifie notre rapport à ce qui est cadré … nous sommes bien piègés ….
L’auteur Martin Vaughn-James est peu connu : il a prété son visgae au personnage d’ Augustin Desombres peintre maudit du cycle des Cités Obscures de Schuitten et Peeters ; il bâtit ici un univers d’une rare étrangeté à partir de l’incessante transformation de quelques lieux et quelques objets : chambres peu à peu envahies par le sable, murs qui se lézardent à vue d’œil, larges taches d’huile, d’encre ou de sang, végétation proliférante qui recouvre des ruines, tableaux et cadres amoncelés dessinant le plus aberrant des musées : un récit crée à partir du néant , une enquête policière dont chaque lecteur trouvera peut être la résolution sans qu’elle soit forcèement la même pour tous.
L’ouvrage réeedité pour la seconde fois est accompagné d’une préface de l’auteur, qui le resitue dans le contexte des années 70, de la contre-culture et du Nouveau Roman.
Il est suivi d’une postface de Thierry Groensteen, « La Construction de La Cage », illustrée de nombreux documents issus des carnets de travail de Vaughn-James.
La Cage (Coach House Books, 1975 ; trad. par Les Impressions Nouvelles/Mécanique générale, 2006 ; rééd. Les Impressions Nouvelles, 2010 puis 2023) est un somptueux labyrinthe qui n’est pas sans évoquer celui du film d’Alain Resnais « L’année dernière à Marienbad ».
Et pour nous d’y voir une métaphore de la condition humaine : notre monde comme une prison dorée ou nous adorons les objets de consommation , mais peut être que notre regard à condition de s’eveiller pourra nous aider à prendre conscience que nous sommes la cage qui enferme notre esprit ..