Clint se remet en scène comme dans Grand Torino sans toute fois de répéter: ce film semble testamentaire mais n’est pas pour autant crépusculaire …
Le pitch est assez simple :à 80 ans, Earl Stone est aux abois. Il est non seulement fauché et seul, mais son entreprise risque d’être saisie. Il accepte alors un boulot qui – en apparence – ne lui demande que de faire le chauffeur. Sauf que, sans le savoir, il s’est engagé à être passeur de drogue pour un cartel mexicain.Extrêmement performant, il transporte des cargaisons de plus en plus importantes. Ce qui pousse les chefs du cartel, toujours méfiants, à lui imposer un « supérieur » chargé de le surveiller. Mais ils ne sont pas les seuls à s’intéresser à lui : l’agent de la DEA Colin Bates est plus qu’intrigué par cette nouvelle « mule ». Entre la police, les hommes de main du cartel et les fantômes du passé menaçant de le rattraper, Earl est désormais lancé dans une vertigineuse course contre la montre… Ce nouveau job sera l’ occasion de renouer avec sa famille et de réparer certaines erreurs du passé …
La Mule est la seconde collaboration avec le scénariste Nick Schenk qui, après Gran Torino, s’inspire ici d’une histoire vraie, celle de Leo Sharp, vétéran de la Seconde Guerre mondiale qui, à 90 ans, est devenu transporteur de drogue pour le cartel de Sinaloa dans les années 2000, à la suite de problèmes financiers.
Faux polar vrai drame sur la fin d’une vie la Mule surprend par son ton ironique et léger : Clint se montre encore bon acteur et fin dialoguiste , son personnage est ironique , blessé et blessant ..Il joue ainsi avec plusieurs couches de son cinéma, mais toujours au service d’un mélodrame sur les liens familiaux patiemment construits. Il y a l’idée qu’il n’est jamais trop tard, même à 90 ans, pour demander pardon et apprendre à connaître son prochain.
Eastwood joue avec son image de conservateur : derrière les provocations affleure une critique sociale de l’ amérique moderne :des vieillards qui se tuent à la tâche et qui peuvent du jour au lendemain être expropriés, un club de vétérans qui n’a plus les moyens d’exister, le niveau de vie dégringolant qui oriente certains à se tourner vers des activités illégales… Même le racisme institutionnel est évoqué, au détour d’une ou deux phrases envers les Mexicains mais aussi envers une famille afro-américaine, bloquée sur le bord de la route, qu’Earl Stone dépanne avec plaisir, mais sans pouvoir s’empêcher de la qualifier de « nègre(s) ».
A final on retiendra de Clint l’ humain conscient de sa part d’ombre , l’ homme qui a fait sa vie une oeuvre d’art quitte à parfois passer à coté de certaines personnes et surtout le poète qui aime les fleurs plus que tout …