Mondes imparfaits : voyage vers ailleurs

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Voila un Ovni transmédia sur le double thème de l’utopie et de la dystopie : un catalogue d’exposition qui se lit aussi comme une somme richement illustré sur un sujet au coeur de la science fiction et nos interrogations post modernes

Cet ouvrage parait à l’occasion de l’exposition MONDES imPARFAITS. Autour des cités obscures à La Maison d’Ailleurs, musée de la science-fiction, de l’utopie et des voyages extraordinaires d’Yverdon-les-Bains (Suisse) visible jusqu’au 25 octobre 2020

Le catalogue est illustré de dessins rares de François Schuiten, de nombreux documents, d’un long entretien entre Marc Atallah, Schuiten et Peeters, de textes de François Rosset et Marc Atallah,
Faisant de multiples références au la littérature au cinéma et à l’illustration il questionne la naissance, la genèse de l’utopie (de Thomas More, Francis Bacon à Campanella, Cyrano de Bergerac, Marivaux…, sans oublier les précurseurs, Platon, Lucien de Samosate…), l’avènement de la dystopie avec Zamiatine, Huxley, Orwell et la présence d’un schème utopique/dystopique dans les Cités obscures. Projet de société idéale, planification d’un bonheur collectif, l’utopie témoigne en son étymologie de l’oscillation qui porte sa visée d’une cité parfaite : elle est à la fois « u-topos », « d’aucun lieu », et « eu-topos », « un lieu bon », prisonnière de l’imaginaire et rêve promis à sa réalisation.

Sœurs siamoises, l’utopie contiendrait en elle la menace d’une dérive vers la dystopie au terme d’une réversibilité des signes (le rêve virant au cauchemar, la liberté à l’aliénation). Sa visée d’un régime juste, égalitaire porterait les germes d’un système totalitaire. Nourries de nombreuses références artistiques, scientifiques (Jules Verne, Borges, Escher, Orson Welles…), Les cités obscures s’ouvre sur un premier album, Les murailles de Samaris, au cœur duquel l’utopie ne compose pas un élément agissant. Dès La fièvre d’Urbicande, l’activation de composantes de l’histoire de l’utopie se connecte à d’autres influences (Piranèse, Kafka…) qui complexifient le terreau utopique/dystopique.

Le travail du binôme Schuiten Peeters sur le Cités Obscures est une belle illustration de cette dialectique C’est au travers de leur élection d’un style architectural singulier que chacune des cités ( Samaris, Urbicande, Xhystos et les autres …) apparaissent comme des mondes utopiques. Une utopie qui, au fil des albums, évolue, passant du rang d’une possibilité à la fois souhaitable et réalisable à celui d’une chimère éphémère .

La métaphore de la Tour de Babel qui est au coeur de la sèrie ( avec l’ album la Tour ) s’est actualisée dans la figure du palais de Justice de Bruxelles qui fait l’objet du dernier album de François ( le dernier Pharaon chez Dargaud): ce catalogue et l’ exposition en sont l’ écho et nous redonnent envie de voir dans les traces artistiques de notre monde dystopique en crise la voie symbolique d’une possible utopie à réactiver

Ouvrage disponible aux impressions nouvelles

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